La livraison de produits frais et surgelés constitue un marché en pleine expansion, comme le montrent les initiatives de La Poste dans ce domaine malgré les contraintes réglementaires et environnementales. Sid Feddal, employé de l'entrepôt de Chronofresh à Chilly-Mazarin (Essonne), plaisante sur les bienfaits du froid pour la circulation sanguine alors qu'il travaille dans un environnement frisquet de 2°C. Les collaborateurs, habillés chaudement, s'occupent des palettes provenant des plateformes de commande en ligne HelloFresh et Poiscaille, dans l'un des sept centres spécialisés de Chronopost pour la livraison de produits "à température dirigée".
Dans une zone contiguë mais hermétique, les employés de Chronopost Healthcare manipulent des colis sensibles, parfois dans des pièces à -30°C, contenant des réactifs de laboratoire, des prélèvements humains et des médicaments réfrigérés.
La Poste, dirigée par Benoît Frette, se diversifie stratégiquement en pénétrant le marché lucratif de la livraison express de produits à température dirigée dans les domaines de l'alimentation et de la santé via Chronofresh et Chronopost Healthcare. En 2022, Chronofresh a enregistré un chiffre d'affaires de 120 millions d'euros, ce qui représente une croissance de 23% par rapport à l'année précédente en 2021.Les ventes de Chronopost Healthcare ont atteint 160 millions (+11%). Ces deux secteurs représentent actuellement 15% du chiffre d'affaires de Chronopost, avec un objectif de 20% d'ici 2025.
Le transporteur se vante d'avoir le réseau sous température dirigée le plus étendu en France, servant aussi bien les particuliers, les restaurateurs et les commerçants dans le domaine alimentaire que l'industrie pharmaceutique, les laboratoires et les hôpitaux pour la partie santé. Le marché de la livraison à température dirigée dans la santé était estimé à 400 millions d'euros en 2019, avec une croissance annuelle de 6 à 7%. Malgré une progression constante, ce marché doit faire face à des défis tels que la hausse des coûts énergétiques et les contraintes liées au changement climatique.
Les professionnels s'inquiètent également d'une nouvelle réglementation européenne en cours visant à réduire l'utilisation des gaz frigorifiques, sans qu'aucune technologie alternative ne soit disponible actuellement.
Les entreprises de transport sont conscientes des enjeux du changement climatique et cherchent à "verdir" leur flotte. Cependant, cette démarche s'avère extrêmement coûteuse, avec des semi-remorques frigorifiques atteignant un prix de 165 000 euros, selon Valérie Lasserre. De plus, les variations de température ont un impact sur les productions, en particulier pour les fruits et légumes qui peuvent être endommagés. Les transporteurs doivent donc faire preuve de flexibilité. Les températures extrêmes rendent également les déchargements et transbordements difficiles, mettant à rude épreuve le personnel et les machines.
Dans le domaine de la santé, une thermorégulation précise est essentielle pour les produits à base de molécules d'origine biologique. Il est essentiel de garantir une maîtrise totale de la chaîne du froid. La surveillance en temps réel de la température des colis est assurée par des sondes placées dans les camions et les conteneurs réfrigérés.
La maintenance est également cruciale pour éviter les déviations de température, qui pourraient entraîner la destruction de marchandises coûteuses. En raison de ces contraintes et du contrôle strict exercé par l'industrie pharmaceutique, le nombre d'acteurs sur le marché du transport frigorifique reste limité, selon le PDG d'Eurotranspharma.